« Cuisine moléculaire » : différence entre les versions

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Je conclurai mon TFE par ce dicton : « Sans changement, il n’est pas de progrès possible » (Citation anonyme).
Je conclurai mon TFE par ce dicton : « Sans changement, il n’est pas de progrès possible » (Citation anonyme).
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Dernière version du 4 juin 2024 à 07:49

Voici un mini résumé de mon Travail de Fin d'Étude qui s'intitule "Cuisine Moléculaire : Mode d'aujourd'hui ou cuisine de demain?"[modifier]

1. Définition :

Qu'est-ce que la cuisine moléculaire ?

Aujourd'hui la définition de la cuisine moléculaire reste très vague car il y a un grand désaccord entre les différents scientifiques et/ou les spécialistes culinaires. Le physicien britannique Nicholas Kurti et le chimiste français Hervé This, tous deux précurseurs de cette nouvelle discipline, élaborèrent une définition bien précise. Pour eux, la gastronomie moléculaire serait « une discipline scientifique, qui recherche à identifier et comprendre les transformations physico-chimiques qui se produisent dans nos aliments dès lors qu'on les cuisine » . Comme l'a dit N. Kurti, « il est paradoxal que nous connaissions mieux la température au centre des planètes et du soleil qu'au cœur d'un soufflé » . Hervé This ajoute : « Un charron qui cercle une roue sait que le cercle de fer doit, quand il est chaud, laisser du jeu autour de la roue de bois, parce que la concentration du métal, au refroidissement, mettra le bois sous une favorable contrainte. Oui, l’empirisme a ses vertus, mais la technologie est bien plus puissante : connaissant le coefficient de la dilatation du fer, l’ingénieur peut, sans aucun essai, prédire la taille exacte du cercle de fer… sans se tromper. Il remplace le tour de main par la certitude du calcul » .

Ferran Adria, reconnu par la critique gastronomique comme l’un des plus grands cuisiniers actuels au monde, est considéré comme étant le précurseur dans la mise en pratique des techniques dites moléculaires dans son restaurant catalan « El Bulli ». Cependant, à son avis, la cuisine moléculaire ne serait « ni plus ni moins une opération marketing lancée par les médias » . Il répète : «Moi, je ne fais pas de cuisine moléculaire. La cuisine n'est que molécules.» Marc Veyrat, chef français multi-étoilés au Guide Rouge Michelin, lui aussi connu en tant que chef moléculaire, va encore plus loin, en affirmant que la cuisine moléculaire n'existe tout simplement pas. Pour eux, ce sont de nouvelles techniques qui améliorent leur cuisine, et non une nouvelle cuisine révolutionnaire.

Malheureusement, cette définition ne convient pas à tout le monde. Pour exemple, le journaliste Jörg Zipprick, anti-cuisine moléculaire, estime que les additifs utilisés dans la réalisation de ces techniques moléculaires pourraient être néfastes pour la santé et affirme que cette cuisine est une supercherie. De même, le critique gastronomique Millau n'y voit qu'un effet de mode qui passera comme la cuisine futuriste de Jules Maincave qui tenta de révolutionner la cuisine française, début du XXe siècle.

Dans le cadre de ce TFE, la cuisine moléculaire sera envisagée en tant qu’utilisation de techniques scientifiques et de leurs principes pour améliorer et innover les textures, les goûts et la présentation des plats.


2. Historique :

De quoi et de qui découle le phénomène de cuisine moléculaire ? H. This remonte jusqu’au IIIème siècle dans son tableau de l’histoire de la gastronomie. Il considère l’écriture d’un papyrus londonien, essai d’explication sur la fermentation de la viande, pour premier écrit sur la cuisine moléculaire. De grands scientifiques se sont intéressés à la cuisine. Avant 1783, Antoine Laurent de Lavoisier (chimiste, philosophe et économiste français, connu pour la loi qui porte son nom et qui a également identifié l’oxygène) se passionna pour la confection « scientifique » du bouillon. Antoine Augustin Parmentier (1737-1813, pharmacien, agronome et nutritionniste français) s’intéressa à l’art culinaire, au moment où il voulut introduire la pomme de terre dans la cuisine française, en étudiant l’amidon et ses propriétés. En Allemagne, Justus von Liebig (1803-1873, chimiste considéré comme un des fondateurs de l’agriculture industrielle) fit fortune grâce à une de ses sociétés qui produisit les « extraits de viande » qu’on utilise encore aujourd’hui en cuisine. Michel-Eugène Chevreul (1786-1889, chimiste français dont les travaux lui valurent la médaille de Copley, récompense scientifique très prestigieuse attribuée par la Royal Society of London) fit évoluer, grâce à ses travaux scientifiques, la compréhension des corps gras.

Mais l’idée de « cuisine moléculaire » comme on l’entend aujourd’hui, germa début des années 80 dans la tête de quelques scientifiques passionnés de cuisine. Ils essayèrent de comprendre le pourquoi et le comment des transformations physico-chimiques qui se déroulent durant la cuisson et la préparation de nos aliments.

L’histoire de la cuisine moléculaire ne s’arrête pas là. Aujourd’hui encore Hervé This et ses collègues cherchent avec beaucoup d’entrain de nouvelles découvertes et applications culinaires.


3. Quelques champs d'application :

3.1. Dans la cuisine d’un particulier

Quelles sont les possibilités pour un particulier de cuisiner de façon moléculaire ?

De plus en plus, le particulier a la possibilité de regarder diverses émissions culinaires à la télévision de plus en plus fréquentes sur nos écrans. Celles-ci diffusent très souvent des rubriques spéciales moléculaires qui laissent supposer un certain engouement pour ce genre de techniques culinaires par un public de plus en plus nombreux. « Topchef », émission française très appréciée du grand public et présentée par Thierry Marx (chef cité dans l’introduction et pointure de la cuisine moléculaire), propose chaque saison une épreuve moléculaire. De même, l’émission « Un dîner presque parfait » a diffusé une émission spéciale moléculaire. Même l’émission quotidienne « Sanschichis », passant sur la Une, a récemment consacré 5 épisodes sur le coaching cuisine moléculaire avec le chef Sang-Hoon Degeimbre du restaurant « L’Air du Temps » (2 étoiles au Guide Michelin), à Noville-sur-Mehaigne.

Le particulier a la possibilité de se procurer des livres de cuisine moléculaire pour plus d’informations. Amazon, grand site d’achat en ligne, propose par exemple plus d’une quarantaine de livres et de kits pour débutants. Et chaque année une dizaine de nouveaux livres viennent s’ajouter à cette liste. Il suffit de lancer une recherche en tapant le mot cuisine pour voir apparaitre en troisième position le mot « moléculaire ».

Pour confirmer cette tendance, toujours sur Amazon, en date du 13 février 2011, le livre « Espumas et Chantilly » de Paul Simon, vendu avec un siphon, était en tête des meilleures ventes dans la catégorie « Cuisine et vin ». Ce livre regroupe plus de trente recettes à réaliser avec siphon, sur base de grands principes moléculaires (voir explication p. 10).

Enfin pour permettre à chacun de se transformer en expert de la cuisine moléculaire, de nombreux sites Internet, dont le très recommandé http://cuisine-innovation.fr, proposent à la vente tout le matériel et les ingrédients nécessaires. De plus, tous ces sites offrent des vidéos explicatives et des recettes faciles à réaliser.

Le particulier motivé et passionné peut donc se procurer aisément matériel, ingrédients et supports pour réaliser des recettes de cuisine moléculaire. Il est à préciser que le coût onéreux du matériel pourra ne dissuader certains. Par exemple le prix d’un kit varie de 12.5 à 40 €, celui des livres de 25 à 120 €. Il faut aussi compter le matériel tel qu’un siphon (minimum 80 €) ou une balance de précision (minimum 30 €).

Il est à signaler que la cuisine moléculaire exige du temps, de la patience et de l’argent. Elle s’adresse donc davantage à un public de passionnés qu’à la ménagère.

A défaut de s’investir personnellement, s’il en a les moyens, le particulier pourra toujours se rendre dans un restaurant, offrant ce style de cuisine, souvent tenu par de grands chefs étoilés.


3.2. Dans l’industrie agro-alimentaire

Bien avant Hervé This et ses disciples, les grandes industries agro-alimentaires investissent beaucoup de temps et d’argent dans la recherche pour optimiser le rendement de leur production. Un exemple souvent cité est celui de réaliser 20 litres de mayonnaise avec un seul jaune d’œuf. Ce genre de réalisation, si elle ne présente que peu d’intérêt pour un particulier ou un grand chef, est très bénéfique pour l’industrie agro-alimentaire.

Malheureusement, dans ce secteur, le rendement prime sur la qualité. Pour illustrer ce fait, il suffit de comparer une soupe en poudre proposée dans toutes les grandes surfaces et fabriquée par déshydratation utilisée en cuisine moléculaire, et une soupe faite maison avec des légumes frais. Certes, leurs goûts se rapprochent mais cette ressemblance est due aux exhausteurs de goûts et est approximative. Ajoutons qu’au niveau de la texture, de l’apport en éléments nutritifs et en vitamines, ces deux soupes ne sont absolument pas comparables.

Ici, le but recherché est d’être le plus productif et rentable possible ; ce qui est l’opposé d’Hervé This qui cherche à comprendre et à utiliser les grands principes scientifiques en cuisine pour améliorer les saveurs, les textures et l’esthétique des plats.


3.3. Dans la cuisine gastronomique

Nombreux sont les grands restaurants gastronomiques qui ont adapté les techniques moléculaires à leur manière. Grâce aux découvertes des scientifiques et un peu d’imagination, ils peuvent créer de nouvelles associations et sensations dans l’assiette. C’est particulièrement pour eux qu’Hervé This et ses collègues travaillent.

Comparé aux particuliers qui ne font que découvrir la cuisine moléculaire pour leur propre plaisir, ou aux grandes industries qui ne cherchent qu’à faire du profit, la cuisine moléculaire travaillée par les grands chefs, permet d’innover. Ces grands chefs font tous un travail pour trouver quelle saveur se mélangerait le mieux avec une autre. Ici nous ne parlons pas d’un passe temps mais bien d’art. Malheureusement éphémère car en quelques instants un plat peut refroidir ou, dans le meilleur des cas, être dévoré…

Cependant, très peu se vantent de faire de la cuisine moléculaire, car aujourd’hui faire ce style de cuisine ce n’est plus original. Trop de nouveaux restaurants la pratiquent et les grands, eux, doivent sans cesse se démarquer des autres.

En Belgique francophone, nous comptons deux grands restaurants étoilés offrant de la cuisine d’inspiration moléculaire. Le premier est « L’Air du temps », à Noville-sur-Mehaigne, de Sang Hoon Degeimbre (déjà cité plusieurs fois). Le chef Sang a un parcours original, car à la base il était boucher, ensuite il s’est tourné vers l’œnologie, pour enfin transporter tout son savoir en cuisine. En 1997, il ouvre son propre restaurant, ancienne friterie qu’il a transformée de ses mains. Aujourd’hui, il a participé à plusieurs émissions de télévision très connues, la dernière est une émission belge, « Comme un chef ». Il a écrit et contribué à plusieurs ouvrages sur la cuisine moléculaire. Son établissement est actuellement gratifié de 2 étoiles Michelin. Le deuxième restaurant est l’ « Hostellerie du Postay », située à Wegnez (Verviers), tenu par le jeune et talentueux chef, Anthony Delhasse qui a décroché un premier macaron au Guide Michelin.


4. L’avenir de la cuisine moléculaire

Une question importante n’a pas encore été soulevée, celle qui concerne la pérennité de la cuisine moléculaire. Les avis quant à son futur divergent beaucoup. Hervé This pense que nous sommes seulement à la naissance de cette nouvelle cuisine. Pour lui, il faudrait que la cuisine moléculaire s’intègre progressivement à notre quotidien. Son souhait serait de continuer ses recherches pour arriver à une cuisine dite de « note à note » ; une cuisine où chaque saveur serait extraite des aliments sous forme de condiments et pourrait être rajoutée comme nous le faisons déjà avec le sel et le poivre.

Le gastronome Christian Millau, rédacteur en chef du guide culinaire Gault et Millau, pense quant à lui que la cuisine moléculaire va bientôt s’éteindre. Pour lui, « La cuisine n’exprime pas l’intelligence, elle exprime des sensations, de la sensualité, ce qui est dans notre cœur, dans nos tripes, mais pas dans notre cerveau. Le cerveau vient bien après. Les émotions, c'est cela la cuisine. Les moyens apportés par l'industrie risquent de démolir son esprit d'origine ». Sa crainte est que l’industrie profite de la cuisine moléculaire pour s’enrichir. En un coup de fil, nous pouvons désormais acheter fioles et extraits d’aliment. Dès le moment où nous n’avons plus besoin du produit pour faire à manger, ce n’est plus de la cuisine, c’est de la chimie.

Tout comme Hervé This, Thierry Marx, célèbre chef triplement étoilé au Guide Michelin et élu, par le Guide Gault et Millau, « Chef de l’année 2006 », croit en l’avenir de la cuisine moléculaire. Pourtant ses propos sont beaucoup plus tempérés que ceux d’Hervé This. Il dit clairement qu’avec la cuisine moléculaire et sans la cuisine traditionnelle, il n’aboutirait à rien.

Malgré qu’elle soit de plus en plus médiatisée, grâce à différentes émissions télévisées, et disponibles sous formes de kits ou livres à son sujet, comment expliquer que la cuisine moléculaire ne soit pas encore installée dans la cuisine de Monsieur et Madame « Tout-le-monde » ? En l’état, il nous faut constater que la cuisine moléculaire n’est pas à la portée de tout un chacun, pour des questions de maîtrise des techniques, de coûts et d’accessibilité aux ingrédients et outils. En outre, le temps de préparation est souvent plus long. Enfin, élément non négligeable, la nourriture fait partie de la culture et nous rappelle très souvent notre enfance. Nous sommes tous attachés à nos traditions et la nourriture en fait partie. La cuisine moléculaire poussé à l’extrême n’a-t-elle pas tendance à déshumaniser l’acte nourricier ?


Conclusion :

Voici ma conclusion suite à mes recherches, elle est personnelle donc si vous n'êtes pas de cet avis, on peut en discuter et argumenter.

Cuisine moléculaire, mode d’aujourd’hui ou cuisine de demain ? Seul l’avenir nous le dira… La cuisine, subtile mélange entre art et technique, est, à mon sens, indissociable du goût, de la qualité des produits et du savoir-faire du cuisinier. Si la cuisine moléculaire est d’intégrer à cela une démarche de compréhension, je pense qu’elle sera la cuisine de demain. Utiliser les technologies pour la création de nouveaux plats, de nouvelles textures, de nouvelles saveurs, de nouvelles sensations… telle, selon moi, sera la cuisine du futur.

Mais n’oublions pas que l’enjeu de la cuisine de demain sera surtout et avant tout que chaque être humain mange à sa faim quelle qu’en soit la forme ! Je veux croire que la science y contribuera. L’association de la cuisine et des sciences saura-t-elle relever la gageure de nourrir une population en croissance sans pouvoir augmenter la superficie agricole de la terre ?

En plus de m’avoir appris ce qu’était la cuisine moléculaire et donné l’opportunité de m’y essayer, ce travail m’a permis d’apprendre à gérer un travail important tout en respectant les délais imposés. Ce travail m’a également fait découvrir des passionnés à l’œuvre, que ce soit du côté des scientifiques ou des grands chefs. J’espère avoir la chance de pratiquer avec autant de plaisir et de passion mon futur métier.

Je conclurai mon TFE par ce dicton : « Sans changement, il n’est pas de progrès possible » (Citation anonyme).